Internat pour les élèves décrocheurs : véritable "opportunité" ou lieu de "redressement" ?

Internat pour les élèves décrocheurs : véritable "opportunité" ou lieu de "redressement" ? Gabriel Attal est en visite à Nice ce lundi afin d'inaugurer un internat pour les élèves décrocheurs. Néanmoins, les critiques fusent parmi les syndicats, qui dénoncent la mise en place d'un lieu de "redressement".

Jeudi dernier, Gabriel Attal a annoncé différentes mesures pour faire face à la violence chez les jeunes. Parmi elles, la mise en place d'internats pour les "élèves décrocheurs". Il s'est alors rendu ce 22 avril à Nice pour l'inauguration à titre expérimental de l'un d'eux. Le maire de la commune, Christian Estrosi, a dévoilé à BFMTV que l'internat du lycée du Parc Impérial allait accueillir "20 primo-délinquants qui sont encore en situation de scolarisation". Pendant les vacances, des cours de soutien et d'éducation civique leur seront alors proposés. 

Il s'agit de limiter les "mauvaises fréquentations" de ces jeunes notamment pendant les vacances scolaires. "Mon idée est simple : avant qu'un jeune ne tombe vraiment dans la délinquance, lorsque l'on s'aperçoit qu'il commence à avoir de mauvaises fréquentations, à traîner dans la rue, nous proposerons aux parents que leur enfant soit envoyé en internat, loin de son quartier et de ceux qui le poussaient à plonger", a précisé Gabriel Attal.

Un dispositif envisageable puisque des places en internat sont actuellement libres. Selon le ministère de l'Education nationale, le taux d'occupation est de 65,9% au collège et 79,1% au lycée. Cette formule pourra aussi être proposée sur l'année. L'envoi des élèves se fait avec l'accord des parents : "il n'y a rien d'imposé ou de répressif", avait précisé Matignon. Pour le Premier ministre, ces internats sont une réelle "opportunité" pour les jeunes, leur offrant "un cadre" et davantage de "chances de réussir" plutôt que "de sombrer dans la spirale de la délinquance et parfois du crime". 

Lors de cette visite, Gabriel Attal a rencontré les jeunes concernés. Ils se sont plutôt montré réticents, insistant sur le fait d'avoir été "forcés" par leurs parents. 

Un lieu de "redressement" selon les syndicats

Pour certains syndicats, ce n'est pas la bonne solution. Selon ces derniers, ces internats pourraient bien vite devenir des "lieux de redressement". "Depuis ces 20 dernières années, l'internat scolaire est réapparu dans les discours politiques, pas toujours pour le meilleur, faisant l'objet d'enjeux idéologiques", a déploré le Snes-FSU, premiers syndicat des collèges et lycées. Selon Olivier Raluy, secrétaire catégorie CPE du syndicat d'enseignants SNES-FSU, auprès de l'AFP, Gabriel Attal présente aujourd'hui "l'idée non pas comme un internat éducatif mais plutôt comme un lieu de redressement" alors que le syndicat voit dans l'internat un "lieu de socialisation, de réussite scolaire et un vecteur de promotion sociale". 

Dominique Gobetti, proviseure d'un lycée avec un internat à Épinay-sur-Seine et représentante du Syndicat national des personnels de direction de l'Éducation nationale, affirme également sur franceinfo que ce n'est pas la bonne voie. "Ça nous semble bien compliqué de donner à un élève une culture civique qu'il n'a pas et de lui apprendre à obéir alors qu'il n'a pas l'habitude de le faire dans sa vie familiale", a-t-elle expliqué. Elle craint que l'internat soit insuffisant pour faire changer les comportements : "j'ai du mal à imaginer qu'un jeune qui est violent à l'extérieur, qui n'arrive pas à obéir à ses parents, puisse tout d'un coup, par miracle, parce qu'il est en internat, parce qu'il est face à un adulte, un surveillant, puisse d'un coup se transformer". Elle estime qu'il faudrait des personnes spécifiquement formées pour une telle mission et défend que malgré son règlement intérieur, l'internat "n'est pas une prison".